21

novembre
2014

CIR et exercice décalé : une gestion problématique ?

 

Cyril Fresse, Directeur Associé de BLOOMOON et expert en fiscalité de la recherche et financement de l’innovation, aborde les problématiques liées à la gestion du Crédit d’Impôt Recherche : comment concilier CIR et exercice décalé, comment structurer la présentation des projets éligibles, comment mener le développement de ces projets dans une optique CIR … ?

 

 

 

Il n’est pas aisé pour les entreprises de déterminer le caractère innovant  de leurs projets ; encore moins de dégager les options à retenir dans le cadre d’une documentation écrite visant à mobiliser le financement de leurs activités. Notre expérience démontre que ces difficultés s’accentuent pour les entreprises dont l’exercice est décalé.

 

En effet, la majorité des entreprises utilise le CIR comme un simple outil fiscal ; elles ne procèdent à la consultation préalable de l’éligibilité d’un projet qu’au seuil des échéances fiscales, se privant du même coup d’un inestimable outil méthodologique. Ainsi, une entreprise clôturant son exercice le 30 juin doit déposer sa déclaration de CIR (cerfa 2069 A) à la liquidation de l’IS, soit le 15 octobre suivant. Rappelons que la déclaration délivrée prend en compte les dépenses de l’année civile N-1. La plupart des entreprises concernées calculera donc son CIR entre le 30 juin et le 15 octobre N+1, soit plus de 18 mois après l’engagement de leurs premières dépenses de recherche.

 

Face à l’obsolescence effrénée des technologies qui structurent les projets, il semble impossible de se convaincre du caractère novateur d’une mesure avancée depuis plus d’un an. On remarque d’autre part un penchant naturel des entreprises pour la censure surtout s’agissant des modalités administratives induites par un contrôle fiscal.

 

Ces décalages constituent donc un frein majeur au développement des projets dans la mesure où la rédaction de la documentation justificative qui devra être produite au vérificateur en cas de contrôle est rédigée en moyenne deux ans après l’engagement des projets, bien après la tombée des échéances fiscales. Et dans le cas où les contributeurs du projet ne sont plus dans l’entreprise, on ne s’étonnera pas de voir la situation devenir rapidement ingérable.

 

La gestion en amont du CIR est donc inévitable pour pallier ces incohérences.

 

 

L’alternative du CIR en amont : une promesse d’opportunité

Le principe est d’offrir un avis circonstancié concernant l’éligibilité de tout ou partie d’un projet lors de son lancement et d’assurer un suivi continu du projet tout au long de sa réalisation. Cette approche favorise une gestion sécurisée et optimisée du projet. Plus encore, une consultation et une gestion préalables offrent de nombreux avantages ainsi que des opportunités d’harmonisation.

 

  • Parmi ces améliorations, la possibilité de tracer des axes d’optimisation structurants et d’entrer dans une logique prévisionnelle favorisant, de manière substantielle, la mise en perspective de vos projets ainsi que le pilotage de la R&D.

A titre d’exemple, une société initiant plusieurs projets aura tout intérêt à accroitre sa visibilité sur les moyens à impartir, et à apprécier par avance les éléments applicables au CIR. De même, une entreprise commercialisant des produits ou des services à fort contenu technologique sera plus à même de savoir comment composer avec les moyens à investir et/ou la marge à facturer si l’impact du CIR est évalué en amont.

 

  • La symbiose opérationnelle

D’autre part, la gestion en amont est inséparable de la mise en place de procédures et de sensibilisation au dispositif au sein des diverses branches opérationnelles qui se déploient au sein de la R&D.

 

A titre d’exemple, si l’on s’interroge sur le caractère éligible d’un projet et que ce dernier nécessite une sous-traitance, il convient de vérifier si le prestataire est agréé ou non. Sans que cet agrément soit nécessairement décisif, la prise en compte de cette information permet une meilleure appréciation de l’écosystème R&D et donc des prises de disposition plus rapides.

 

  • Un développement des outils et une traçabilité de l’activité R&D

Parallèlement à ces mesures, la performance R&D se doit d’être optimisée par des outils permettant de suivre le projet tout au long de l’année et de revenir régulièrement sur son éligibilité au dispositif du CIR. Ces moyens de traçabilité doivent donc œuvrer au découpage des projets en phases éligibles et non éligibles, ce afin de valoriser de manière optimum mais sécurisée le temps consacré aux opérations de recherche et de développement.

 

  • Une documentation scientifique et technique structurante

Concernant la documentation, la démarche en amont permet de constituer dès le lancement du projet un corpus d’informations permettant une meilleure gestion des ressources scientifiques et techniques. Cette documentation n’a pas uniquement vocation à prévenir la contrainte du contrôle fiscal et doit pouvoir être usitée pour ce qu’elle est véritablement : un formidable outil de capitalisation et de partage des connaissances techniques au sein de l’entreprise.

 

Par ailleurs, une documentation structurée sous forme d’axes de recherche et de thématiques définies élargira le périmètre de la recherche éligible au CIR tout en renforçant les acquis techniques et scientifiques de dossiers dont la mise à jour se réalisera de manière autrement plus intuitive.

 

Enfin, au-delà des préoccupations liées au CIR, cette documentation doit jouer un rôle régulateur au sein de l’entreprise en structurant sa connaissance technique et scientifique afin d’élargir le périmètre de la recherche et de permettre l’émergence de programmes pluriannuels dont la gestion et le suivi  constituent des pôles déterminants de la R&D.

 

 

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